Qui n’a jamais prononcé ou entendu cette phrase : « On fait une dernière game ? » ? Dans cet article, nous analysons et décryptons le phénomène de la « dernière partie », celle qui nous fait regretter le matin.
Pour simplifier, nous choisissons d’étudier le phénomène au travers de League of Legends, Fortnite et Among Us. Nous prendrons exemple sur ces trois jeux pour mieux comprendre et expliquer la tare qui touche tous les joueurs de jeux vidéos.
« Encore une dernière partie ? »
Nous connaissons tous cet ami inépuisable, véritable accro du jeu vidéo (il peut s’agir de vous), qui ne se lasse jamais d’aucun jeu et ne dort jamais. Appelons-le « Timoté ».
Timoté enchaîne les parties, clique sur le bouton « rejouer » à chaque fois que l’une d’elles se termine. De préférence, il relance une nouvelle partie le plus vite possible. Cela a pour but de vous empêcher de regarder l’heure et, par conséquent, de partir vous coucher. Car Timoté n’a aucun autre ami que vous. Il est 23h06 et vous acceptez de relancer une partie de League of Legends. Pour l’instant, vous êtes raisonnable.
Mais « c’est la dernière ! » dites-vous. Vous en profiterez pour donner quelques excuses bidons : « je travaille demain », « je dois nourrir mes enfants » ou encore « mon chat miaule ». Après tout, vous venez de remporter la dernière partie, c’était serré, vous avez bien mérité « une petite dernière » sur la faille de l’invocateur.
Malheureusement, ce soir, vous avez perdu la dernière game après avoir trollé sur la midlane avec votre Yasuo. Toute la partie, vous avez insulté votre jungler en 0/10/2 avec Malphite (ça ne peut être que de sa faute !). Intérieurement, vous êtes détruit mais vous avez lu les articles suivants : « Mes alliés sont mauvais, que faire ? #1 » et « l’art de perdre une partie dans League of Legends ». Alors vous relativisez : de toute façon, c’était la dernière, il est presque minuit ; vous allez pouvoir lire un bon livre et vous calmer de cette dure défaite.
Cependant, il y a toujours Timoté dans votre casque. Ce petit enfoiré, qui jouait Malphite dans la jungle sur la partie d’avant, vous propose une offre que vous ne vous pourrez pas refuser. En effet, avec une vivacité que les Hommes qui se lèvent très tôt n’ont pas, il lance :
« Une petite ARAM ? »
Auparavant, vous étiez sur les nerfs (pour les raisons que nous avons vu) mais Timoté, votre super pote, l’a bien senti. Ainsi, il vous propose de faire une dernière partie plus « légère ». Preuve en est, le substantif employé « petite » apporte de la nuance et vous pousse vers l’ARAM. Dans l’abîme hurlant, il y a des Poros, de la neige, des champions aléatoires… Que du plaisir ! Et Timoté a raison : vous vous amusez beaucoup dans ce mode de jeu.
A ce propos, lisez ici l’interview que nous avons réalisé avec Tony le Poro.
Vous avez remporté la partie. Il est 00h24, Timoté ne parle plus, il sait que vous regarderez l’heure et partirez, prétextant une nouvelle excuse. Alors il jouera sans doute la carte de l’émotion. En effet, faisant appel à vos sentiments, il dira que vous êtes beau et répètera à plusieurs reprises son argument favori, difficilement contestable :
« Allez. »
A ce moment-là, votre libre arbitre ne dépend plus de vous. En effet, les hormones dégagées par la victoire précédente, et surtout l’ocytocine procurée par l’ARAM, vous feront perdre la raison. Timoté, que vous détestez d’habitude, vous paraît maintenant bien sympathique. Alors vous acceptez, il est 00h29.
Vous ne le savez pas encore mais ce n’est que le début de la soirée. Timoté, ce traître, possède de la ressource pour vous convaincre d’en re-re-re-faire une dernière. Par conséquent, demain, vous ne vous lèverez pas et vous perdrez votre travail.
La première leçon à tirer de cette expérience, après ces six games, est que vous ne saurez jamais quelle « dernière » sera LA dernière. Il est donc important de connaître cette loi générale et d’en prendre conscience. Dès lors, vous serez prévoyant, la prochaine fois, avant de rejouer avec Timoté.
Il est tard : vous pensez en avoir fini avec Timoté. Finalement vous aurez fait trois, quatre voire cinq ARAMs, vous ne vous rappelez plus vraiment… Cependant, grave erreur, ce brave Timoté vous dit ceci :
« Il nous manque une personne pour jouer à Among Us, tu viens ? »
Premièrement, vous serez flatté que ce cher Timoté pense à vous. Vous accepterez. Pourquoi ? Parce que vous n’avez pas d’amis. Parce que ça fait bien des années qu’on ne vous appelle plus pour jouer. Cette gratification peut s’avérer (comme ici) empoisonnée. En effet, quelques minutes ont suffit pour que vous soyez invité dans un salon de discussion discord avec des inconnus. En plus, ces mêmes personnes n’hésiteront pas à vous insulter à la première occasion lorsque vous serez imposteur. De même, on retrouvera ces insultes lorsque le petit frère de Timoté vous éliminera (pour la 3e fois) en premier.
Il est bientôt 3h du matin et vous commencez à vous demander ce que vous faites ici. Et c’est légitime. Après avoir joué deux heures à Among Us, vous pourriez être pris du syndrome de « l’imposteur ». Ainsi, vous ne vous sentez plus légitime à votre place. Chaque partie remportée n’a plus aucune valeur. Aussi, la victoire n’est plus savoureuse. et Timoté ne parvient plus à vous remotiver (à ce propos, lire l’article sur Among Us et les Accords Toltèques : « Among Us : peut-on respecter les 4 accords toltèques ? »).
Dévasté par le jeu vidéo, vous ouvrez la porte de votre chambre et vous y trouvez votre femme. Celle-ci vous gronde ; ce soir vous dormirez sur le canapé. Le problème est que votre ordinateur se trouve juste à côté du canapé et que son écran bleu vous excite encore…
Comme l’explique le site Medicolo, « être devant son écran d’ordinateur, de téléphone, de tablette ou de TV perturbe le sommeil et ce à cause de la lumière bleue émise par ces objets qui excite le cerveau et vous maintien éveillé ». Dès lors, il faudrait éteindre votre écran une heure avant de dormir. Cependant, il est déjà trop tard pour vous. Ces « dernières games » proposées à outrance par votre ami Timoté vous ont plongé dans cet état d’excitation duquel il sera difficile de sortir. Ajoutez à cela votre rage de vaincre et vous avez toutes les clés en main pour comprendre le phénomène de la « dernière game ».
« Un petit Fortnite ? »
La dernière partie joue sur vos faiblesses personnelles et psychologiques. Celui qui les propose vous sait plus faible. Remontez donc à la source du problème : vous ne savez pas dire non.
Timoté le noctambule vous indique maintenant qu’il joue à Fortnite. Après tout, pourquoi ne pas le rejoindre ? C’est cette nostalgie propre à l’enfance qui vous rattrape et vous tape sur l’épaule. Celle-ci vous rappelle que vous n’avez pas lancé Fortnite depuis la saison 2 car vous étiez trop mauvais. Alors, vous prenez votre casque, rejoignez un vocal et vous vous mettez à « chuchoter ». Cependant, votre femme ne l’entend pas de cette oreille. Bientôt, elle vous quittera, accompagnée des enfants et du chat, pour un « Mathieu » (c’est votre ami un peu snob qui ne joue pas aux jeux vidéos). Pour Timoté qui joue avec vous, ça n’est pas un problème car Timoté est au chômage et personne ne se préoccupe de lui ; il n’existe pas vraiment.
Il est 6h du matin et vous n’avez pas fait mieux que #Top5. Le jour se lève et la « dernière partie » de Timoté s’est transformée en véritable cauchemar.
La règle suivante à retenir pour éviter le phénomène de « la dernière game » : Timoté est un c**.
Résumons la situation.
Vous avez joué toute la nuit. Ainsi, votre femme est partie, votre chat aussi. Les voisins ont porté plainte contre vous pour tapage nocturne après que vous ayez déclaré : « Tuez-le cet astronaute ! » à maintes reprises.
En vous réveillant cet après-midi, Timoté vous a envoyé un message « merci pour hier soir ». En clair, vous avez l’étrange sensation d’être un coup d’un soir qu’on aurait piétiné toute la nuit. C’est deux jours plus tard que vous comprendrez que Timoté, qui n’est plus votre ami, vous a manipulé. En effet, il a contrôlé vos émotions mais surtout vous a trompé sur certains points (vous n’êtes pas aussi doué qu’il vous l’a dit).
Les hormones présentes dans votre corps vous ont aussi poussé à continuer à jouer. Si cela vous procurait du bien-être auparavant, aujourd’hui, vous ressentez un brin de tristesse en repensant à votre chat.
Ensuite les écrans naturellement excitants vous ont maintenu éveillé. Ajoutez à cela votre ambition personnelle d’être toujours le meilleur aux jeux auxquels vous jouez (surtout contre le petit frère de Timoté) et vous avez saisi ce qui vous pousse toujours à continuer.
Pour conclure, difficile donc de savoir s’arrêter à une « dernière partie ». C’est aller contre sa volonté d’agir ainsi et d’éteindre son ordinateur à 23h. Pourtant, pour éviter de tomber dans la spiral infernale, n’ayez pas peur d’être jugé en allant dormir tôt. Vous perdrez sans doute des amis… ou bien Timoté… Mais ça, ce n’est pas très grave !